Société d’ Histoire de Revel Saint-Ferréol                                        LES CAHIERS DE L’ HISTOIRE

 

 

Cent ans de vidanges du barrage-rEservoir de Saint-FerrEol

Par Jacques BATIGNE

 

RETOUR ACCUEIL
RETOUR PIERRE PAUL RIQUET

 

 

  

En accord avec Riquet, les experts choisirent le vallon de Vaudreuille où serpentait le ruisseau d’Audot (diminutif de Aude, soit un cours d’eau impétueux). Près de la ferme de Saint-Ferréol, un resserrement du vallon sur un verrou rocheux fut retenu comme site de l’emblématique digue de Saint-Ferréol, dont la construction allait constituer au XVIIème siècle, un exploit sans précédent. "Cet ouvrage admirablement bien conservé et en service depuis 1672, sans de grandes défaillances, étonne encore de nos jours les constructeurs contemporains..." (citation de feu Monsieur Gabriel Houlié, ingénieur hydrologue au Service de la Navigation, aujourd’hui VNF à Toulouse, ayant participé à la construction du barrage de la Gravette aux Cammazes). Certains disent encore de nos jours que ce barrage allait devenir à l’époque, le plus important au monde ?...

 

Il fut commencé au début de l’année 1667, avec la pose de la première pierre en avril, en présence de l’évêque de Saint-Papoul et de l’archevêque de Toulouse. Il sera terminé en 1672, pour la partie construite par Riquet et parachevé en 1687 par Vauban, avec un rehaussement de la digue de 24 pieds. Plus de mille ouvriers : terrassiers, maçons, charpentiers, tailleurs de pierre, forgerons... vont y travailler durant cinq années sans relâche, sous la direction et le contrôle de Riquet et de ses ingénieurs Andréossy, de Clerville et Vauban, qui continuera après la mort de Pierre-Paul Riquet, le 1er octobre 1680.

 

Coupe et élévation des voûtes et maison de Saint Ferréol   

 

Vidanges et travaux


       L’année 1828 a connu une vidange totale et le remplacement des robinets servant à quantifier les besoins en eau pour l’alimentation du Canal du Midi. Après la vidange de 1831, la "chambre" des robinets et le remplacement de ceux-ci, à nouveau (il y en a trois), a été reconstruite en 1845.

 Rappelons que ces immenses robinets boisseaux (comme ceux d’un tonneau) sont en bronze, et que les gros tuyaux qui vont chercher l’eau à l’avant de la partie immergée du grand mur ont une longueur de 10 à 12 m.

Autre vidange totale en 1851.

En 1853 est construite la voûte (aqueduc) immergée à l’intérieur du barrage, de la vanne supérieure de la Badorque.

Les années 1866 voient une vidange totale et 1869 une vidange partielle.

Terminons ce XIXème siècle par les vidanges de 1880 et 1889.

Des travaux de rejointement et d’étanchéité ont été effectués à chacune de ces opérations de mise à sec du barrage, ainsi que le remplacement des vannes en bois par des vannes métalliques.
Ne quittons pas ce XIXème siècle, sans reparler succinctement des aménagements paysagers faits à la fin de ce siècle-là .
 

Le parc et ses magnifiques allées, enserrant le plan d’eau, l’ensemble d’une superficie de 90 hectares, avec ses multiples essences d’arbres, ses pinèdes…

En contrebas du barrage, couronné par le mur aval (construit par Vauban vers 1686) avec l’entrée des voûtes accessibles, les belles cascades et la "superbe gerbe" (jet d’eau) qui fonctionne naturellement, par la pression de l’eau contenue dans le barrage.

                      

 

Mise à sec du barrage réservoir Saint-Ferréol en 2004
       Crédit photos : J. Batigne

La vanne de vidange dans la voûte de l'enfer,
      au niveau de l'ancien lit du Laudot
      Crédit photo : Denis Estève

 

 

 

 

 

Les poissons noyés dans la boue
      Crédit photos :Denis Estève

Construction de l’ouvrage


Ce barrage-masse est composé d’une digue (grand mur) de près de 800 m de longueur, de 32,50 m de hauteur et de 140 mètres d’épaisseur environ ; pour une capacité totale de 6 500 000 mètres cubes et une superficie de 67 hectares lorsqu’il est plein. Cette digue est elle-même composée de trois murailles :
- Le mur amont qui est immergé dans les eaux, de 60 m de long, de 19,50 m de haut et de 3,90 m d’épaisseur, sur lequel est érigée une colonne appelée pyramide de 21 m de hauteur ; elle était utilisée pour mesurer la hauteur de l’eau, donc le volume, d’un seul "coup d’œil". Elle fut construite en 1769 et est graduée en toises et en pieds.
- Le mur central, ou grand mur d’une longueur de 786 m et de 32,50 m de hauteur (au point le plus bas dans le lit de la rivière) avec une épaisseur de plus de 12 m dans sa partie basse et de 1 m dans sa partie haute. Il est couronné par une margelle et une belle allée promenade au sommet.
- Le mur aval ou mur des voûtes, de 80 m de long, haut de 29,25 m et de 2,80 m d’épaisseur.

 

Entre ces trois murailles distantes d’environ 65 m ont été tassés des remblais d’enrochement et des terres argileuses. Elles sont reliées par quatre galeries souterraines, deux immergées en amont (accessibles uniquement dans les vidanges du barrage) et deux sèches en aval. A l’intérieur de ces voûtes se trouvent les mécanismes, vannes et "robinets" (occultés aujourd’hui) de distribution et quantification de l’eau nécessaire à l’alimentation du Canal, ainsi qu’à la vidange du réservoir.
Ces galeries sont superposées et ont des fonctions bien distinctes. A l’amont, nous avons dans la partie inférieure la "voûte de l’enfer" et dans la partie supérieure la "voûte du tambour". A l’aval en bas, nous avons la "voûte de vidange" et au-dessus la "voûte des robinets". Ces deux dernières sont accessibles pour la commande des vieux robinets à boisseaux, l’ancien système et de la vanne "papillon" en service aujourd’hui, automatisée.

D’autres vannes dites de la "Badorque" et de trop plein, permettent également la régulation de l’eau à différents niveaux et alimentent les belles cascades dans le parc d’agrément.

 

Une canalisation partant de l’intérieur du barrage alimente la fameuse gerbe ou jet d’eau d’une vingtaine de mètres de hauteur.
L’ensemble du réservoir est alimenté par le lit du Laudot, grossi des eaux, des rivières du versant méditerranéen, elles-mêmes déversées aux Cammazes par le passage de la Rigole de la Montagne dans la "Voûte de Vauban" (aqueduc souterrain de 122 m de longueur et de 3 m de largeur).

 

Un petit canal appelé "Rigole de ceinture", contourne par le sud-est le réservoir de Saint-Ferréol et permet de neutraliser l’entrée de l’eau dans celui-ci. L’ensemble se rejoignant en aval du barrage jusqu’à l’ancienne écluse des Thomasses. Cette dernière constitue le point de jonction avec la Rigole de la plaine venant de Revel et amenant les eaux du Sor par la dérivation du Pont-Crouzet (entre Revel et Durfort). A la dérivation du Laudot (point de jonction) le débit des eaux est quantifié et mesuré avant l’arrivée à Naurouze (environ 30 kms de là) point de partage naturel, à 189 mètres d’altitude. Ces eaux alimentent alors le Canal du Midi, dont les besoins sont d’environ 20 à 25 millions de mètres cubes annuellement.

 

 

La petite Histoire du Bassin…Lac…de Saint-Ferréol
Ce site unique, "…miroir d’eau inséré dans un écrin de verdure…" comme se plaisait à le dire notre ami Bernard Blancotte, a une particularité géographique et administrative bien particulière…?
En effet il est situé à cheval sur deux régions : Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon ; trois départements : l’Aude, la Haute-Garonne et le Tarn ; quatre communes : Revel et Vaudreuille (dans le 31), Soréze (dans le 81) et Les Brunels (dans le 11).
Le propriétaire, c’est l’Etat ! Comme l’ensemble des canaux du Midi, des Rigoles d’alimentations et autres barrages (le Lampy chez nous), l’ensemble étant classé au Patrimoine Mondial de l’UNESCO (United Nations Educational Scientific and Cultural Organisation). Sa gestion est assurée par le Service de la Navigation (dépendant du Ministère des Transports) devenu il y a une quinzaine d’années un Etablissement Public d’Etat, sous le joli nom de Voies Navigables de France.

 

 

Référence bibliographique : Jacques BATIGNE, publication dans Couleur Lauragais n°69 et 70 – Février-Mars 2005

 

 

 

 

 

Plan du barrage réservoir
de St Ferréol (début XVIIe s.)

Crédit photo :
Collection Jacques Batigne

 

 

 

 

RETOUR PIERRE PAUL RIQUET